Le Pays dunois en l’an 507, haut lieu de l’histoire mondiale de l’action humanitaire
C’est une histoire que nous sortons des oubliettes.
Elle fut racontée en latin pour la première fois au VI° siècle ! Saviez-vous qu’en l’an 507, au Pays Dunois, nommé IDUNUM et RIDUNUM, s’est déroulée la toute première ACTION HUMANITAIRE de l’histoire mondiale de l’aide humanitaire.
Et ceci par la volonté de l’ermite burgonde EPTADE d’AUTUN.
Trois mille Dunois ont été déplacés en Burgondie et réintégrés à IDUNUM.
Oui, c’est bien cela : en l’an 507 en Pays dunois.
Ce sauvetage s’est déroulé lors de la guerre terriblement ravageuse et meurtrière menée en Aquitaine par CLOVIS contre les Wisigoths où trois mille personnes (oui, 3000) furent faites prisonnières à DUNUM et transportées en Burgondie pour être réduites en esclavage. C’était un spectacle courant, en ce temps-là, ces longs convois de captifs enchaînés marchant à pied derrière les chariots des vainqueurs – et parfois, les hommes ayant été massacrés, de prisonnières avec leurs enfants destinés à repeupler les terres lointaines. Les moins costauds d’entre eux mouraient de faim, d’exténuation, de douleur et de misère. Or, en Burgondie, vivait EPTADE D’AUTUN. L’histoire raconte que cet influent personnage acheta les 3000 prisonniers pour les sauver du sort de l’esclavage et qu’il obtint de CLOVIS roi des Francs et de SIGISMOND roi des Burgondes, leur retour à IDUNUM. Le texte en latin dit : « une plateforme du Limousin nommée IDUNUM » [castro provincie Limovicine Idunum]. Les Dunois furent affranchis et rapatriés vers leur village. Qui sait ? Vous, Dunois, qui lisez ce texte, peut-être y reconnaitrez-vous une ou un de vos ancêtres.
Ces rocambolesques transferts étaient possibles au VI° siècle car les mandataires de justice s’appuyaient sur des registres officiels rassemblés à Limoges, les gesta municipalia.
Pour plus de détails, les curieux peuvent aller lire [Michel ROUCHE, Clovis, p. 554].
Cette fantastique séquence a été enfouie dans l’abîme de l’oubli. Et pour cause ! Un autre événement qui s’est déroulé simultanément a pris toute sa place dans les livres d’histoire. Celui de la Bataille de Vouillé de 507 sur la voie romaine à l’ouest de Poitiers où CLOVIS affronta et tua ALARIC II le roi des Wisigoths. Les Francs ont alors occupé toute l’Aquitaine jusqu’à Toulouse incluse, repoussant les Wisigoths vers l’Espagne. Or les Wisigoths étaient installés sur tout le Limousin. Pour arriver à ses fins et les prendre en étau, CLOVIS a fait appel à SIGISMOND roi de Burgondie, qui a traversé l’Auvergne, longé la Creuse, ravagé IDUNUM et emporté les prisonniers.
A travers les siècles, plusieurs auteurs ont repris l’histoire d’EPTADE et de son œuvre humanitaire. Mais souvent le doute s’est installé sur l’emplacement exact nommé IDUNUM. Jusqu’à ce que Michel ROUCHE, Professeur des Universités, grand spécialiste de la Gaule, de l’Aquitaine et de CLOVIS soit catégorique et situe à Dun Le Palestel sur les cartes géographiques contemporaines, le [castro provincie Limovicine Idunum] du VI° siècle.
Dès lors, découvrant cela, les Amis des Croix Type Crozant s’émeuvent et lisent et lisent et cherchent et cherchent pour connaître les événements historiques qui se sont déroulés sur notre territoire au premier millénaire. Ils relèvent que dans sa Monographie de la commune de Dun Le Palestel publiée en 1950, Georges VERGEADE relate avoir lu l’histoire d’EPTADE D’AUTUN et encourage à l’approfondissement de la question de la situation géographique exacte de IDUNUM. : « Evidemment, ce texte nécessiterait une étude poussée que nous n’avons pas la possibilité de faire pour l’instant, et donc nous en laissons le soin à un historien mieux informé », conclut-il.
Et puis, en préface des actes du colloque 2022, François AVISSEAU, Doyen de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’Université de Limoges encourage lui aussi à la poursuite de l’exploration :« Cette étude pionnière sur les croix de type Crozant ouvre décidément de vastes perspectives et gageons qu’elle suscitera de nouveaux travaux. Si le mystère demeure, l’attrait de la quête aussi ».
Philippe HIROU a saisi ces invitations au vol. Après avoir attiré l’attention sur la forme byzantine de ces mystérieuses croix, il n’a cessé de creuser la question. Aujourd’hui, il nous offre une étude qui approfondit et aboutit à une hypothèse sur la datation et la fonction de la cinquantaine de croix érigées le long de la rive gauche de la Creuse, en lien avec l’œuvre humanitaire de EPTADE. Philippe HIROU démontre que le IDUNUM du V° et VI° siècle s’étendait sur la rive gauche de la CREUSE avec comme point culminant l’éperon rocheux de la forteresse. CROZANT n’avait pas encore pour nom CROSENC mais RIDUNUM. Et que c’est là qu’on s’est battu et que les dunois ont été fait prisonniers, etc. ; etc. Pour comprendre cette histoire il faut fermer les yeux et imaginer les rives de la Creuse sans les habitations ni les découpages communaux d’aujourd’hui.
L’étude de Philippe HIROU est postée en ligne sur le site ACADEMIA.EDU